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Mise à jour de 2025 sur les F&A du marché intermédiaire : En attente d’un décollage?


17 juin 2025Article de blogue

À l’approche de la moitié de l’année 2025, l’activité de fusions et acquisitions (« F&A ») connaît une croissance irrégulière, marquée par des forces de marché contradictoires et des niveaux d’activité inégaux. Cette situation contraste fortement avec les attentes élevées du début de l’année, alors que les conditions semblaient réunies pour une résurgence significative des F&A, sous l’effet d’une confluence de conditions de marché favorables dont une amélioration de l’environnement macro-économique, avec la stabilisation de l’inflation, des taux d’intérêt moins élevés et un dollar canadien plus faible; une réduction des écarts d’évaluation entre acheteurs et vendeurs; une poudre sèche importante et croissante détenue par les groupes d’investisseurs privés, qui subissent de plus en plus de pressions pour déployer des capitaux; un bassin de sociétés de portefeuille aux prises avec un marché de sortie difficile; une vague attendue de ventes de la part d’entrepreneurs fondateurs visant la relève de leurs entreprises; et une croissance des transactions ciblant des sociétés ouvertes – y compris des fusions, des opérations de fermeture, des scissions et des ventes d’actifs – en réponse à des campagnes d’actionnaires activistes. Mais depuis le début de l’année, ces forces ont été fortement contrebalancées par un certain nombre de vents contraires inattendus, émanant principalement du sud de la frontière, notamment une politique défavorable et imprévisible en matière d’échanges commerciaux, et une incertitude géopolitique croissante. Ces vents contraires ont, à leur tour, servi à mettre en évidence les lacunes de notre économie nationale en termes de croissance de la productivité, d’obstacles au commerce intérieur, d’élaboration de projets à grande échelle et de gestion budgétaire.

Trouver des occasions de F&A dans un contexte incertain

Si les turbulences du marché ont mis de côté de nombreuses transactions, en particulier celles dont l’évaluation est incertaine en raison d’une exposition éventuelle aux tarifs douaniers, les négociateurs se sont adaptés pour saisir des opportunités émergentes dans ce nouveau contexte. L’attention a notamment été portée sur les transactions nationales, en partie grâce au retrait des investisseurs en capital-investissement américains, qui a suscité un engagement accru de la part des groupes de capital-investissement canadiens, ainsi que des investissements plus importants des fonds de pension canadiens et d’autres groupes d’investisseurs publics nationaux. On observe aussi un intérêt grandissant pour les secteurs peu exposés aux échanges commerciaux ou qui présentent des perspectives de croissance soutenues par de fortes tendances macro-économiques, notamment la technologie et l’intelligence artificielle, l’énergie et les infrastructures, l’exploitation minière et les minéraux critiques, les soins de santé et les services financiers. Enfin, les entreprises et les investisseurs adoptent plusieurs stratégies d’atténuation pour s’adapter au contexte de commerce actuel. Il s’agit notamment d’investissements défensifs visant à reconfigurer les chaînes d’approvisionnement ou à réduire l’incidence des tarifs douaniers, ainsi qu’un accent mis sur les entreprises ayant de fortes ventes à l’échelle nationale, des modèles d’entreprise axés sur les services ou un pouvoir de fixation des prix suffisant pour résister aux conséquences des tarifs douaniers.

F&A en 2025 : principaux développements juridiques

Quatre grandes tendances sur le plan juridique ont façonné la pratique transactionnelle en 2025 : un environnement réglementaire plus difficile, notamment pour les transactions du marché intermédiaire; une structuration plus créative des transactions en réponse à l’incertitude du marché; une croissance continue du recours à l’assurance des déclarations et garanties dans le cadre d’un éventail de plus en plus large de transactions; et une plus grande attention portée à la vérification diligente.

Un environnement réglementaire plus difficile

Les récentes mises à jour importantes des lois canadiennes sur la concurrence et les investissements étrangers ont pour conséquence un examen plus approfondi des transactions, ce qui nécessite une meilleure planification en amont, des délais éventuellement plus longs et une négociation minutieuse des dispositions contractuelles connexes. Bien que les seuils d’avis obligatoire ne s’appliquent généralement qu’aux transactions les plus importantes, il convient de faire observer que ces lois s’appliquent à toutes les transactions, quelles que soient leur taille ou les parties en cause.

En 2024, un certain nombre de modifications importantes ont été apportées à la Loi sur la concurrence, qui auront pour effet de soumettre un plus grand nombre de transactions à des exigences d’approbation et à des dépôts obligatoires, d’exiger probablement des processus d’examen plus longs pour les transactions sur des marchés concentrés, et éventuellement d’appliquer des mesures correctives plus onéreuses. En outre, ces modifications porteront d’un an à trois ans la période rétrospective au cours de laquelle le Bureau de la concurrence peut contester rétroactivement des transactions non déclarées, une modification destinée en partie à traiter les stratégies de « consolidation » (roll-up) dont les effets anticoncurrentiels potentiels peuvent apparaître graduellement au fil du temps.

Dans un tel contexte, les négociateurs devront se concentrer davantage sur la vérification diligente à un stade précoce et l’élaboration d’une stratégie concernant le risque lié à la concurrence afin de confirmer la viabilité de la transaction. Pour les transactions qui aboutissent, la négociation de clauses provisoires, notamment en ce qui concerne les efforts que l’acheteur doit déployer pour obtenir l’autorisation des autorités de réglementation de la concurrence ainsi que les conditions de clôture connexes, constituera un domaine d’intérêt majeur. Les parties devront également adapter avec soin les dispositions relatives aux dates limites et à la prorogation des délais afin de tenir compte des délais d’approbation prévus et des imprévus éventuels. Enfin, l’utilisation d’indemnités de résiliation ou de dédit dans le cas où la transaction ne serait pas conclue est essentielle pour motiver correctement les parties tout en répartissant le risque de non-réalisation.

L’année 2024 a également été marquée par une transformation importante de nos lois sur les investissements étrangers, qui, depuis récemment, mettent davantage l’accent sur les questions de sécurité nationale. Les récentes modifications à la Loi sur Investissement Canada comprennent l’élargissement des pouvoirs ministériels à l’examen des transactions qui soulèvent des questions de sécurité nationale, et la prise de mesures à cet égard. Aujourd’hui comme jamais, les éléments clés dont il faut tenir compte pour toute transaction transfrontalière proposée sont l’identité de l’acquéreur sous l’angle de son territoire d’origine et de ses propriétaires véritables, ainsi que toute question politique ou de réputation connexe, et la nature de l’activité de la société cible, y compris si elle exerce des activités dans un secteur jugé sensible par le gouvernement canadien. Il peut s’agir de biens et de services essentiels, de minéraux et d’infrastructures, ainsi que de technologies sensibles.

Plus récemment, en réponse aux mesures prises par l’administration américaine, le gouvernement canadien a expressément inclus la question de la « sécurité économique » dans l’examen relatif à la sécurité nationale. Pour déterminer si un investissement est susceptible de porter atteinte à la sécurité économique du Canada, le gouvernement tiendra compte, entre autres, de la taille de l’entreprise cible canadienne, de sa place dans l’écosystème de l’innovation et de l’incidence de la transaction sur les chaînes d’approvisionnement canadiennes.

Bien que les modifications relatives aux secteurs d’activités désignés ne soient pas encore en vigueur, les investissements étrangers dans ces secteurs feront l’objet d’une nouvelle exigence de dépôt d’un avis préalable à la clôture afin d’éviter un examen relatif à la sécurité nationale. Le gouvernement doit encore désigner les secteurs d’activité qui seront soumis à ce nouveau régime obligatoire, mais on peut s’attendre à voir un nombre croissant d’examens relatifs à la sécurité nationale lancés dans ces secteurs, en particulier lorsque l’investisseur étranger possède des participations importantes provenant d’États étrangers hostiles, ou s’il est susceptible d’être influencé par ces derniers.

Ce nouvel environnement exigera des négociateurs qu’ils procèdent à une évaluation précoce de la question de l’incidence éventuelle sur la sécurité nationale. Compte tenu des pouvoirs ministériels accrus décrits ci-dessus, les parties seront incitées à aborder les enjeux éventuels de manière proactive afin d’éviter que le gouvernement n’impose des mesures provisoires coûteuses, telles que des actions visant à empêcher un investisseur d’accéder aux sites commerciaux ou à la propriété intellectuelle de l’entreprise canadienne. De même, les conventions de transaction sont susceptibles d’inclure des clauses de répartition du risque plus explicites en matière d’investissements étrangers et de sécurité nationale, ainsi que des dispositions plus normatives en ce qui concerne tout processus d’examen anticipé et les délais qui y sont liés. Enfin, les négociateurs doivent tenir compte du fait que la « sécurité nationale » est un concept évolutif et hautement politisé et, par conséquent, que le paysage réglementaire est amené à évoluer rapidement.

Une structuration plus créative des transactions

Pour les transactions qui vont de l’avant en dépit des défis actuels du marché, les négociateurs ont fait preuve d’une plus grande créativité dans leur structuration afin de résoudre les principaux obstacles, qu’il s’agisse de la valeur, de la répartition du risque ou de la certitude de la transaction. Les approches permettant de combler les écarts d’évaluation – qu’ils soient dus à un écart entre les cours acheteur et vendeur ou à une incertitude concernant la valeur causée par des facteurs externes ou contingents – comprennent le fait de lier la capacité de gain au rendement financier futur et/ou à la réalisation d’étapes commerciales précises, ainsi que le maintien de la participation et d’autres ententes de rémunération différée afin de réduire le prix d’achat initial et de lier les incitatifs au rendement futur. De même, les acheteurs et les vendeurs répartissent plus soigneusement entre eux des risques particuliers (et avec les assureurs tiers, de la manière indiquée ci-après) en adaptant les déclarations et les garanties, et en se concentrant davantage sur ce qui constitue ou non un « effet défavorable important » et déclenche les droits de résiliation correspondants. Pour les transactions dont la signature et la clôture sont retardées en raison de la nécessité d’obtenir l’approbation des actionnaires ou des consentements de tiers de la part de contreparties contractuelles ou d’organismes de réglementation, les parties se sont efforcées de renforcer la certitude de la transaction en précisant soigneusement le niveau d’effort que chaque partie doit déployer pour obtenir les approbations et consentements requis, notamment des conditions de clôture particulières, et en imposant des frais de résiliation ou de dédit ou des obligations de remboursement de frais dans le cas où la transaction ne serait pas conclue.

Croissance continue du recours à l’assurance des déclarations et garanties

Le recours à l’assurance des déclarations et garanties (l’« ADG ») est de plus en plus fréquent dans un éventail de plus en plus large de transactions de taille, de secteurs et de modèles divers : selon une estimation, 75 % des transactions de capital-investissement et 64 % des plus grands acquéreurs stratégiques ont désormais recours à l’assurance contre les risques transactionnels. L’ADG tire une grande partie de son attrait du fait qu’elle permet aux vendeurs d’effectuer une « sortie propre » tout en offrant aux acheteurs un recours utile et solvable. Le recours à l’ADG permet aussi aux parties d’éviter de longues négociations sur l’indemnisation et le risque de conflit lorsque l’équipe de direction des vendeurs reste en place après la transaction. Malgré ces avantages, l’ADG n’assure généralement que les risques inconnus et, par conséquent, le processus de prise ferme exige en principe un processus rigoureux de vérification diligente tant sur le plan financier que juridique. Lorsque des éléments de risque importants sont repérés, ils peuvent nécessiter des structures d’indemnisation et d’entiercement distinctes pour protéger les acheteurs.

Une attention accrue portée à la vérification diligente

Ensemble, les trois tendances décrites ci-dessus en entraînent une quatrième, soit qu’une attention accrue doit être portée au processus de vérification diligente. Ce qui comprend : des enquêtes préliminaires autour de questions touchant les seuils comme le risque lié à la réglementation, notamment en ce qui concerne l’examen en matière de concurrence ou d’investissements étrangers; la vérification diligente habituelle visant les questions financières, juridiques et de l’exploitation; et un nouvel accent mis sur les catégories émergentes de risque induites par l’évolution des technologies, le renforcement de la réglementation ainsi que l’évolution des marchés, dont la cybersécurité, l’intelligence artificielle, la protection de la vie privée, la lutte contre le blanchiment d’argent et les pratiques de corruption étrangère, les questions relatives aux chaînes d’approvisionnement et les questions d’ordre environnemental, social et de gouvernance.

Perspectives : Tout est prêt pour le lancement d’une F&A?

Malgré des vents contraires imprévisibles, les perspectives à moyen terme pour les F&A restent favorables en raison d’une confluence de forces à long terme qui soutiennent fortement l’activité transactionnelle, tant du côté des acheteurs que des vendeurs. Toutefois, une reprise significative et généralisée des F&A dépendra en grande partie de l’instauration d’un environnement géopolitique et d’échanges commerciaux plus stables et plus prévisibles. Dans l’intervalle, il faut s’attendre à une poursuite des F&A plus ciblées, les négociateurs faisant preuve de créativité et de résilience en s’orientant vers un ensemble plus restreint d’opportunités qui subsistent en dépit de l’incertitude actuelle du marché, ou qui surgissent en raison de celle-ci.

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